MEDAILLE Albert Portevin
La médaille Albert Portevin est attribuée par la SF2M, en principe tous les deux ans, à une personnalité ayant apporté une contribution éminente dans les domaines dans lesquels s’est distingué Albert Portevin, notamment la transformation et les propriétés de mise en forme des matériaux.

Lauréat 2024
Marc BERNACKI
Directeur de recherche, Mines ParisTech CEMEF
Marc Bernacki, mathématicien de formation, a réalisé sa thèse de doctorat à l’Ecole Nationale des ponts et Chaussées de 2002 à 2005 sur l’étude numérique et la modélisation de la propagation d’ondes dans des milieux hétérogènes. Attiré, grâce à cette expérience, par les matériaux et la modélisation des EDPs, il découvre le CEMEF en septembre 2005 en postdoc et ne le quittera plus.
Comme le dit Marc lui-même, une carrière tient parfois à quelques rencontres inspirantes : « J’ai eu beaucoup de chance de découvrir le CEMEF au travers de deux regards très différents, de gens passionnants et passionnés et aussi d’un entretien de recrutement en postdoctorat avec des attentes antagonistes ! En effet à l’époque Roland Logé et Thierry Coupez ont su me convaincre que j’étais l’homme de la situation sur une thématique en rupture de l’art que je ne maitrisais absolument pas et qui en fait n’existait pas encore vraiment ! Un sujet à la croisée entre métallurgie fine et méthodes numériques de suivi de front où chacun des deux excellait dans son propre domaine. Il s’agira probablement de la meilleure (bien que risquée !) décision de ma carrière, je leur dois beaucoup par la liberté totale qu’ils m’ont laissée et la qualité des idées en métallurgie et des outils/méthodes numériques qu’ils m’ont transmis. En effet, quel meilleur bac à sable pour un amoureux des maths que la cristallographie, le monde étonnant des joints de grains, et de leurs caractéristiques thermodynamiques ou cinétiques, l’adaptation de maillage éléments finis anisotropes et les approches de type capture ou suivi d’interfaces pour des réseaux complexes. Si aujourd’hui cela coule de source (au moins pour moi et, heureusement, pour quelques collègues et les étudiants qui m’accompagnent maintenant dans l’aventure et que je remercie), il y a vingt ans ce n’était absolument pas le cas. Pour que cette thématique puisse s’épanouir (et moi de même), d’autres protagonistes ont évidemment été indispensables, Yvan Chastel tout d’abord, en tant que responsable de l’équipe MSR puis directeur du CEMEF, tout aussi attiré par les sujets fous, à l’énergie toujours débordante et qui a voulu m’embaucher un beau matin pour que je puisse continuer mes pérégrinations sur les mêmes thématiques alors que des sujets de recherche beaucoup plus terre-à-terre étaient en passe de m’éloigner de l’école des MINES de Paris en 2008. Que dire de Jean-Loup Chenot qui a cru à l’outil industriel DIGIMU avant tout le monde, moi y compris ! Enfin, cette aventure aurait pu rester celle d’un pur numéricien si Nathalie Bozzolo n’avait pas rejoint l’aventure un peu plus tard et n’avait pas fait l’effort de me coller le nez sur de vrais matériaux. Quel challenge motivant que d‘arriver à la convaincre que la plupart de mes simus n’étaient alors pas qu’une coquille vide, du genre jeu vidéo pour épater la galerie ! Grâce à cette exigence, ces sujets ont pris une nouvelle dimension en croisant à nouveau entre nous des compétences très différentes et complémentaires pour répondre à des questions académiques réelles, sur des matériaux tout aussi réels, avec des attentes industrielles non moins réelles. Je crois que sans m’en rendre compte, j’ai bien fini par devenir, grâce à cela, aussi passionné par la métallurgie numérique que la métallurgie physique. Au final, Roland, Yvan, Thierry, Jean-Loup, Nathalie, merci pour tout.»
Marc a ainsi été recruté à l’école des MINES de Paris en tenure track en juillet 2008, il y a été nommé chargé de recherche en 2011, maître de recherche en 2015 et directeur de recherche en 2020. Il mène toujours sa recherche au CEMEF où Il y dirige l’équipe Métallurgie microStructure Rhéologie. Il pilote par ailleurs le consortium DIGIMU ainsi que la chaire ANR Industrielle RealIMotion tous deux dédiés à la diffusion de méthodes numériques en sciences des matériaux au sein du tissu industriel Français. Ces actions sont aujourd’hui soutenues par de grands groupes industriels tels que ArcelorMittal, Aperam, Aubert & Duval, Constellium, Framatome, et Safran ainsi que par le CEA.
Ses travaux de recherche portent sur le développement de méthodes numériques avancées pour la description des matériaux à l’échelle mésoscopique et le calcul multi-échelles pour la prédiction et l’optimisation des microstructures lors de la transformation des matériaux métalliques. Ces sujets sont plus que jamais clés pour l’impact environnemental, sociétal, économique et de souveraineté de nombreux secteurs stratégiques (aérospatial, nucléaire, énergies renouvelables, défense, transport…).
L’originalité des simulations tient à la complexité naturelle des matériaux métalliques à l’échelle polycristalline ainsi qu’à la physique foisonnante des nombreux mécanismes métallurgiques à l’œuvre lors des procédés de mise en forme. Les outils numériques qu’il a ainsi développés avec son équipe contribuent (par rétro-ingénierie et dialogue permanent avec les essais expérimentaux) à la compréhension de certaines propriétés intrinsèques aux défauts présents dans la matière et encore largement discutées dans la communauté (énergie de joints de grains, macles, mobilité…). Ces travaux concourent donc à la fois à des développements académiques mais aussi à des applications bien concrètes pour l’optimisation des procédés industriels de fabrication.
Le caractère générique des outils numériques développés par Marc et son équipe permet aujourd’hui par ailleurs leur mise en application à d’autres champs de recherche comme en métallurgie des poudres, en contrôle non destructif ou pour des matériaux géologiques voire extra-terrestres.
L’ensemble de ses travaux a mené à plus de 140 publications dans des revues à comité de lecture. Marc a obtenu un prix spécial du jury à la conférence ESAFORM en 2013 et un trophée TERATEC en 2017 pour la solution DIGIMU avec la société Transvalor. Il est membre du comité éditorial de plusieurs journaux, du conseil de l’école d’ingénieur Polytech Sophia, du comité de direction du CEMEF et y est responsable depuis octobre 2024 de la spécialité doctorale « Mathématiques Numériques, Calcul Intensif, et Données ».
Enfin, terminons ce bilan rapide de 20 ans de recherche sur la dimension de la transmission des savoirs. Marc a toujours eu à cœur de disséminer ses approches en modélisation auprès de nombreux étudiants, doctorants, post-doctorants et collègues ainsi qu’au sein de grands groupes industriels en collaboration avec des experts matériaux de renom. Il a ainsi pu accompagner et former 43 doctorants et 15 post-doctorants.

tous les lauréats depuis 1966
2024 | Marc BERNACKI | France |
2022 | Roland LOGÉ | Suisse |
2020 | Jean-Loup HEUZÉ | France |
2018 | Nathalie BOZZOLO | France |
2016 | Pascal JACQUES | France |
2014 | Mikhail LEBEDKIN | France |
2012 | Gilbert FANTOZZI | France |
2010 | Frank MONTHEILLET | France |
2008 | Eric FELDER | France |
2005 | Magnus LANGSETH | Norvège |
2003 | Jean-François AGASSANT | France |
2000 | Roger FOUGERES | France |
1997 | Bernard BAUDELET | France |
1996 | Georges MARTIN | France |
1995 | James DAVIDSON | France |
1994 | Barry THOMAS | France |
1993 | Gérard MAEDER | France |
1992 | Jean-Louis CHERMANT | France |
1991 | André PINEAU | France |
1990 | Philippe BERGE | France |
1988 | Georges CIZERON | France |
1985 | Michel EUDIER | France |
1982 | Jean MORLET | France |
1979 | Jacques LECLERC | France |
1976 | Pierre LAURENT | France |
1974 | Paul ROCQUET | France |
1972 | Paul KOZAKEVITCH | France |
1970 | Otto SCHAABER | Allemagne |
1968 | René CASTRO | France |
1966 | Paul BASTIEN | France |